Bureau Louis XV
Les détails d’une restauration de bureau à pente d’époque Louis XV
Comparé au style rococo de certains pays continentaux, le Louis XV français reste mesuré et sans excès. La courbe n’est plus qu’une ligne droite assouplie, infléchie avec naturel et non une contorsion filandreuse que l’on trouvera trop souvent hors de France. C’est le moment de la perfection française. La durée d’évolution de ce style s’étend de 1725 à 1760 environ. Les formes du bureau à pente qui nous occupe possèdent en tous points les caractéristiques du style :
• Les formes du meuble sont galbées en plan et en élévation.
• Les traverses sont chantournées en arbalètes.
• Utilisation du frisage de placage.
• Les placages sont en palissandre, bois de violette, de rose, amarante, satiné, amourette (ici, placage en palissandre)
Cette période se caractérise par une foison de création de meubles nouveaux. Les besoins ont évolué et les ébénistes se sont empressés de satisfaire une clientèle friande de nouveauté et de confort. Le bureau à pente fut d’ailleurs créé à cette époque : vers la fin des années 40. Sa vogue dura une trentaine d’année avant qu’il ne soit détrôné par le triomphe du bureau à cylindre.
Lecture du meuble: déterminons son époque de fabrication!
Voici la liste non exhaustive des éléments de datation :
Mesures duodécimales : La taille du bâti n’est pas en cm mais dans une mesure ancienne (qui n’est pas ici le pied du Roy) mais une des mesures de province duodécimal.
Traces des anciennes serrures et charnières : Les Traces d’anciennes entailles pour les serrures 3 points des tiroirs et pour la charnière en queue d’aronde de l’abattant (voir photo ci-dessous). Elles ont dû être changées au XIXe siècle pour des éléments en laiton considérés comme plus esthétiques.
Les bronzes : Les entrées de serrures en Bacchus et Cérès sont surmoulées mais les sabots semblent d’origine au regard du travail du « matis » (parties mates), l’examen à la loupe de l’état de surface révèle un travail irrégulier réalisé à la pointe, travail très caractéristique du XVIIIe siècle ( voir photo ci-contre). Les sabots sont aussi marqués de deux lettres, peut être les initiales de l’ouvrier.
Les tiroirs : La technique de fabrication est typiquement d’époque Louis XV : 3 queues d’arondes seulement pour fixer les cotés, chants arrondis, fonds fixés en feuillure, plaquettes collées sur les queues d’arondes et faisant office d’arrêt du tiroir et enfin les cotés et l’arrière sont de la même hauteur.
Les traces de rabots à dents en contre parement : Lors de la dépose d’une partie du placage sur l’abattant, nous nous sommes aperçus de l’existence de 2 sortes de placage : un d’origine, datant du milieu du X VIIIe siècle avec 14 traces de denture pour 2cm et l’autre, en placage scié utilisé lors d’une restauration.
Les fonds de propreté: Les panneaux sont à fleur de la traverse et confirment une technique du milieu du XVIIIe siècle.
Proportion divine : Les meubles étaient proportionnés avec le nombre d’or de la divine proportion. Ici la profondeur du bâti peut être obtenu par la largeur multipliée par 0.618 environs.
Établissement à la pierre noire : Vous pouvez voir ci-dessous les trace d’établissement faites à la pierre noire ou au fusain et non pas au crayon à papier apparût au XIXe siècle.
Constat d’état
Le bureau nous est parvenu à l’atelier dans un état ambivalent. D’une part le bâti était dans un bon état général avec une infestation très limitée et des assemblages solides.
Par contre le placage du palissandre avait souffert d’une forte exposition au soleil. De nombreuses cloches et lacunes étaient à déplorées.
Une fente du placage au milieu de l’abattant s’était produite, du fait du retrait des bois de sapin du panneau sous le cuir. Il nous faudra rainurer sous le cuir pour combler la fente. Une dépose d’une partie du placage sera réalisée, pour ensuite le re-plaquer avec du palissandre scié.
Restauration du placage
Nous avons rainuré jusqu’à la languette le bois coté cuir pour y coller un morceau de chêne qui stabilisera le panneau et empêchera tout retrait (voir ci-dessous). Du coté du placage un flipot fut rajouté dans la fente.
Les cloques furent recollées et des greffes furent réalisées avec le placage d’origine trouvé sur l’abattant.
Les bronzes
Les bronzes furent déposés et nettoyés au vinaigre chaud dilué puis brossés après rinçage. Ils furent ensuite vernis au cellulosique afin de les protéger de l’oxydation (voir ci-dessous).
Finition
Cette étape commence tout d’abord par un dégagement de surface réalisé avec un produit décapant sans soude qui respecte le bois. Tout le vernis est retiré sans pour autant supprimer la patine du bois.
Le gommage permet de « gommer » comme son nom l’indique les rayures et les enfoncements provoqués par les chocs mais sans poncer complètement le bois.
La mise en teinte des greffes a été faite chimiquement et un lait de teinte à l’eau fut appliqué pour unifier la couleur du meuble.
Le remplissage des pores effectué à la ponce terminé, un vernis gomme laque « éléphant » fut appliqué au tampon. Une goutte de benjoin a été ajoutée à l’alcool lors de l’éclaircissage.
L’intérieur du meuble fut quant à lui vernis au vernis « surfin » , d’abord au pinceau puis au tampon.